La levure de boulangerie aide les scientifiques à comprendre comment les médicaments interagissent


Frederick Roth, titulaire de la Chaire d'excellence en recherche du Canada sur la biologie intégrative de l’University of Toronto et chercheur principal du Lunenfeld-Tanenbaum Research Institute du Mount Sinai Hospital de Toronto, a récemment expliqué comment la levure de boulangerie permet aux scientifiques de mieux comprendre la façon dont les médicaments interagissent chez l’être humain.

Quand une personne prend deux médicaments ou plus à la fois, l’efficacité de chacun peut être amoindrie ou accrue. De même, il est possible qu’un médicament amplifie la toxicité d’un autre. Ce genre d’interaction représente une importante cause de maladie et d’hospitalisation. Or, pour des raisons éthiques et financières, les études de médicaments chez l’être humain sont limitées. Résultat : les scientifiques ne peuvent pas étudier en profondeur l’interaction des médicaments auprès des patients, même lorsqu’il s’agit d’en tester de nouveaux pour les faire entrer sur le marché. Par conséquent, les chercheurs se servent d’organismes modèles plus simples pour mener leurs études. Cela leur permet d’examiner l’interaction des médicaments de façon systématique à un coût relativement abordable.

Ainsi, M. Roth et ses collègues ont testé l’effet de médicaments sur le micro-organisme Saccharomyces cerevisiae, communément appelé « levure de boulangerie », car un ancêtre commun de ce micro‑organisme et de l’être humain en fait un sujet d’étude idéal.

« De nombreux aspects du génome de la levure et de l’être humain n’ont pas changé depuis qu’ils se sont écartés de leur ancêtre commun, il y a un milliard d’années, a expliqué M. Roth. Quand une combinaison précise de médicaments provoque une réaction surprenante sur la croissance de la levure, il n’est pas certain que le résultat soit le même sur les cellules humaines. Toutefois, cela donne une idée générale de la fréquence à laquelle les médicaments peuvent augmenter ou réduire l’efficacité des autres. »

Par ses travaux de recherche, Frederick Roth a montré que, dans près d’un cinquième des combinaisons testées, un médicament réduit l’efficacité d’un autre. Il a aussi montré que certains médicaments ont plus tendance à réduire l’efficacité d’autres et que l’efficacité de certains médicaments est plus souvent réduite.

En 2001, son équipe de recherche a publié une étude à ce sujet, laquelle montre comment, pour environ un tiers des tests effectués, les combinaisons de médicaments accroissent l’efficacité médicamenteuse. « Si l’interaction entre médicaments produisait des résultats aussi rapides chez l’être humain, il y aurait de quoi s’inquiéter », a conclu le chercheur.