Philippe Van Cappellen mène une étude sur les déchets plastiques dans les Grands Lacs


Philippe Van Cappellen, titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur l’écohydrologie de l’University of Waterloo, dirige une équipe qui étudie l’accumulation des déchets plastiques dans les Grands Lacs et ses conséquences sur l’environnement. Cette étude vise notamment à déterminer les types de plastiques trouvés ainsi que les lieux de grande concentration du plastique dans le but d’élaborer des stratégies de prévention.

Au cours d’une entrevue menée par le Waterloo Region Record, M. Van Cappellen a indiqué que les débris de plastique présents dans les Grands Lacs – et dans les océans – pourraient représenter un risque environnemental beaucoup plus sérieux qu’on ne le croyait.

« On oublie souvent que le plastique est un contaminant du milieu aquatique », a souligné le chercheur. Il est très durable, donc il ne se décompose pas dans l’eau, mais se désagrège simplement en particules de plus en plus petites, que les oiseaux, les poissons et d’autres animaux aquatiques – comme les crustacés – peuvent facilement ingurgiter. Les microplastiques inquiètent particulièrement les scientifiques. Il s’agit de minuscules fragments et fibres de plastique qui peuvent se retrouver jusque dans le tissu musculaire des poissons et d’autres animaux sauvages.

Ce qui est encore plus alarmant, c’est que le plastique agit un peu comme une éponge et concentre les produits chimiques toxiques. Ceux-ci, par l’intermédiaire des animaux, sont introduits dans le réseau alimentaire et peuvent se propager jusqu’à l’être humain. Ces toxines comprennent des métaux lourds et des produits chimiques qui sont aujourd’hui interdits, comme le DDT et le BPC, qui ont un impact environnemental très grave et sont reconnus comme étant des facteurs du cancer et des déficiences congénitales.

Selon M. Van Cappellen, il n’y a pas très longtemps que les scientifiques mènent des travaux de recherche sur les déchets plastiques dans les Grands Lacs, et leurs questions restent nombreuses. Par exemple, quelle est la quantité de déchets plastiques dans les Grands Lacs? Sous quelle forme se présentent-ils? Où s’accumulent-ils? À quel point sont-ils répandus? Quelle incidence ont-ils sur les organismes?

Des recherches préliminaires ont montré que des déchets plastiques sont présents partout dans les Grands Lacs, mais que la plus grande concentration se trouve dans le lac Érié. Parmi ces déchets, les chercheurs ont notamment trouvé des jouets, du papier d’emballage alimentaire, des bouteilles d’eau et des mégots (lesquels sont fabriqués de fibres plastiques et représentent la forme la plus courante de pollution plastique du monde).

« Nous avons également trouvé une grande quantité de granules de plastique », a précisé Alex Driedger, étudiant de maîtrise travaillant avec M. Van Cappellen. Ces granules, gros comme une graine, représentent la matière première que l’industrie du plastique fond et moule pour faire des produits utilisables. Ce type de microplastiques passe aisément d’un habitat à l’autre et est facilement ingurgité par les animaux, mais il est très difficile de s’en débarrasser.

« Quand on sait de quel type de plastiques il s’agit, on peut déterminer l’origine de la pollution et tenter de la contenir ou de la prévenir », a expliqué M. Van Cappellen. C’est pourquoi son équipe de recherche se sert des données satellites disponibles pour déterminer les principaux lieux d’accumulation du plastique dans les Grands Lacs.

« Le changement radical de la température des eaux de surface et la quantité de chlorophylle présente dans l’eau permettent d’indiquer les lieux de convergence des courants dans les Grands Lacs, a précisé le chercheur. Nous partons de l’hypothèse selon laquelle le plastique s’accumule à ces endroits. Or, c’est également là que la vie aquatique se concentre, ajoute-t-il. C’est donc là que nous devons porter notre attention. Selon moi, ce n’est que la pointe de l’iceberg. »

Philippe Van Cappellen

Philippe Van Cappellen

Chaire d’excellence en recherche du Canada sur l’écohydrologie