L’expert en nanotechnologie Steven Bryant et le scientifique spécialisé en chimie verte Robin Rogers se rencontrent pour discuter de solutions novatrices et durables pour l’industrie
À première vue, l’élaboration de matières plastiques à partir d’écorces d’arbres et la fabrication de matériel de suture à l’aide de carapaces de crevettes n’ont rien à voir avec la quête d’énergie durable. Pourtant, deux des chercheurs les plus éminents du Canada étudient les procédés utilisés pour mettre au point ces nouveaux matériaux en vue d’aider à transformer l’industrie pétrolière et gazière.
L’utilisation de nouveaux matériaux pour résoudre d’importants problèmes que connaît l’industrie est aujourd’hui l’un des domaines scientifiques qui évoluent le plus rapidement. Steven Bryant, titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur le génie des matériaux liés aux réservoirs de pétrole non classiques de l’University of Calgary, et Robin Rogers, titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la chimie et les produits chimiques écologiques de l’Université McGill, sont reconnus comme des pionniers en la matière.
C’est à la réunion annuelle des titulaires de chaire d’excellence en recherche du Canada (le Programme des chaires d’excellence en recherche du Canada attire au Canada les meilleurs chercheurs de partout dans le monde, et sa réunion annuelle rassemble certains des esprits les plus brillants), qui a eu lieu à Waterloo en avril 2015 et où ils avaient été invités à présenter leurs travaux, que les deux chercheurs ont discuté pour la première fois de la possibilité d’unir leurs recherches dans le domaine des nouveaux matériaux. M. Bryant, ingénieur en nanotechnologie de renommée internationale, a assisté à la présentation de M. Rogers qui portait sur les liquides ioniques et la chimie verte, tandis que M. Rogers était présent à l’exposé de M. Bryant sur la nature et l’ampleur des défis que posent les sables bitumineux.
Et c’est à ce moment qu’a germé l’idée d’innover et de collaborer.
« J’avais déjà entendu parler de liquides ioniques, mais j’ai finalement compris de quoi il s’agissait en assistant à la présentation de Robin », a déclaré M. Bryant. « J’ai réalisé à quel point nos travaux de recherche avaient beaucoup en commun : ce que Robin fait et certaines des techniques qu’il utilise pourraient vraiment nous aider à relever les défis auxquels nous faisons face dans l’exploitation du pétrole lourd et des sables bitumineux. »
Des chercheurs à la fine pointe de leurs domaines respectifs
En octobre 2014, M. Bryant est devenu le premier titulaire d'une chaire d'excellence en recherche du Canada de l'University of Calgary. Dans le cadre de ses travaux, il cherche surtout à accroître l’efficacité de la récupération in situ du pétrole des sables bitumineux, et ce, en tirant parti des avancées de la nanotechnologie. En mettant au point des procédés reposant sur l’utilisation de particules altérées chimiquement qui se lient de façon différente au pétrole et à l’eau et qui sont assez petites pour passer à travers les pores d’un réservoir, M. Bryant et son équipe espèrent utiliser moins de vapeur, récupérer davantage de pétrole et réduire, voire éliminer, l’empreinte carbone associée à l’extraction non classique d’hydrocarbures.
M. Rogers est une sommité mondialement reconnue en ce qui concerne la conception et la mise au point de la nouvelle génération de biomatériaux durables. Ses travaux révolutionnaires portent notamment sur les liquides ioniques, une nouvelle catégorie de sels qui sont liquides à température ambiante et qui pourraient transformer la chimie et la science des matériaux, ainsi que sur la fabrication industrielle.
En se servant de liquides ioniques, M. Rogers a mis au point un procédé permettant de créer des plastiques renouvelables à partir de la dégradation de la lignine – un polymère d’origine végétale qui apporte de la rigidité au bois et à l’écorce et qui est normalement détruit pendant la fabrication des pâtes et papiers. Il a également découvert une façon d’utiliser la chitine, un constituant de la carapace des crevettes que l’on jette habituellement, pour fabriquer des produits utiles tels que du matériel de suture et des pansements.