Pleins feux sur Pierre Marquet

Des racines en santé, clés de la sécurité alimentaire mondiale

Compte tenu de la rapidité à laquelle se produisent les changements climatiques et du fait que la population mondiale devrait atteindre les neuf milliards de personnes en 2050, l’un des plus grands défis que doit relever l’humanité consiste à faire en sorte qu’il y ait suffisamment d’aliments nutritifs pour tous. On estime que, pour répondre aux besoins croissants, la production alimentaire des pays en développement devra doubler, voire tripler.

Trouver des façons de produire des cultures d’un rendement supérieur utilisant moins d’eau, d’énergie et d’autres intrants agricoles est un défi de taille. Heureusement, Leon Kochian, nouveau titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur les systèmes de production alimentaire et la sécurité alimentaire de l’University of Saskatchewan, est prêt à relever ce défi.

Leon Kochian croit qu’un élément clé de la solution se trouve dans la culture de végétaux aux racines saines et vigoureuses, capables d’une absorption efficace de l’eau et des éléments nutritifs. En approfondissant ses recherches sur la « partie cachée » des végétaux – leur système racinaire –, il s’attaque à l’un des aspects les moins bien explorés de l’amélioration et de la croissance des plantes.

La sélection ciblée de caractéristiques supérieures des racines n’est pas un phénomène nouveau dans le monde, selon M. Kochian. L’étude des racines en vue de l’amélioration végétale mène à la longue à de nouvelles variétés d’un rendement supérieur, plus résilientes et capables de croître dans les sols les moins fertiles au monde.

Leon Kochian se joint à l’équipe du Global Institute for Food Security (GIFS) de l’University of Saskatchewan. Doté de 50 millions de dollars, cet institut créé en 2012 est le fruit d’un partenariat qui regroupe l’université, PotashCorp et le gouvernement de la Saskatchewan. M. Kochian sera directeur général associé de l’institut. Il fera également partie du corps professoral du College of Agriculture and Bioresources de l’University of Saskatchewan, où il enseignera la phytotechnie et la science des sols.

 [Il est] crucial de trouver des solutions susceptibles d’aider les sélectionneurs locaux à composer de façon durable avec les conditions agricoles de leur région. 

Ces dix dernières années, M. Kochian a dirigé une équipe internationale de spécialistes de la recherche sur les cultures, dont les travaux ont permis de beaucoup mieux comprendre les gènes et les fonctions connexes grâce auxquels les systèmes racinaires des plantes peuvent s’adapter à des sols pauvres, en particulier là où le rendement est limité en raison du manque d’éléments nutritifs minéraux et de la présence de métaux toxiques.

Ayant eu l’occasion de voyager dans des pays en développement et d’y observer les problèmes auxquels font face les agriculteurs, il estime crucial de trouver des solutions susceptibles d’aider les sélectionneurs locaux à composer de façon durable avec les conditions agricoles de leur région.

Ayant été rattaché pendant plus de 30 ans à la Cornell University et au ministère de l’Agriculture des États-Unis, Leon Kochian entend maintenant tabler sur l’excellence de longue date en recherche agricole et en innovation de l’University of Saskatchewan pour affermir la réputation du Canada à titre de chef de file de la recherche sur la sécurité alimentaire mondiale.

Il dirigera des travaux de recherche visant à déterminer et cartographier les gènes associés aux caractéristiques du système racinaire qui favorisent l’absorption des éléments nutritifs et de l’eau dans des conditions de sécheresse. Ces travaux seront menés par une équipe pluridisciplinaire comprenant des chercheurs en biologie moléculaire, en génétique et en physiologie végétale, ainsi qu’en informatique et en génie. Il prévoit que ces recherches permettront d’augmenter le rendement des cultures dans les endroits peu fertiles, notamment dans les pays en développement où les sols sont acides. Ces sols représentent jusqu’à 50 p. 100 des terres potentiellement arables de la planète.

Leon Kochian et son équipe mettront au point de nouveaux outils d’imagerie des racines, afin d’observer ces dernières en trois dimensions dans le sol et d’examiner leur structure et leurs fonctions. Il est de plus en plus important que les sélectionneurs comprennent cette « architecture » du système racinaire, puisque les sécheresses, les inondations et d’autres phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que l’infertilité croissante des sols, font diminuer la superficie de sols sains pouvant servir à la production alimentaire.

L’équipe de Leon Kochian utilisera le synchrotron du Centre canadien de rayonnement synchrotron et d’autres outils révolutionnaires d’imagerie des racines dont l’université est dotée, ainsi que des technologies informatiques de pointe, afin de numériser les caractéristiques souhaitées (les phénotypes). L’équipe pourra ainsi sélectionner les systèmes racinaires convenant à des environnements donnés, et ce, pour les principales cultures – dont le blé, l’orge, la lentille et le colza – au Canada et ailleurs dans le monde.

Selon M. Kochian, l’University of Saskatchewan dispose d’un large éventail de nouvelles technologies et d’une expertise pluridisciplinaire, qui permettront de mettre au point des outils pouvant procéder rapidement à l’imagerie de l’architecture racinaire de milliers de végétaux. Il sera ainsi possible de constituer la plus imposante base de données numériques connue et de doter l’université d’un centre de calibre mondial dans le domaine du phénotypage racinaire, un domaine peu étudié mais qui a suscité énormément d’intérêt récemment en raison des changements climatiques.

Le fait de travailler dans l’une des universités canadiennes les plus renommées dans le domaine de l’agriculture, dans une province qui est un chef de file mondial de la production culturale et un important fournisseur d’engrais, offre à Leon Kochian un milieu naturel, où son équipe peut œuvrer auprès de producteurs et d’autres partenaires de partout dans le monde afin de promouvoir l’adoption de nouvelles cultures et de nouvelles technologies et de contribuer à relever des défis de taille en matière de sécurité alimentaire mondiale.

« L’University of Saskatchewan, affirme M. Kochian, est une locomotive de la recherche agroalimentaire, un lieu où des liens peuvent être tissés entre les chercheurs en agriculture, les phytogénéticiens, les toxicologues, les chercheurs vétérinaires, les hydrologues, les experts en nutrition et les chercheurs en politiques, ­ce qui accroîtra considérablement la pertinence et l’impact des recherches. »

Les travaux de l’équipe seront importants aussi bien sur le plan économique que sur le plan humanitaire. Il en résultera des solutions technologiques auxquelles il sera possible d’avoir recours pour promouvoir l’utilisation efficiente des ressources en eau, en sols et en énergie et pour produire les données qui sont nécessaires afin d’inspirer des politiques publiques et des pratiques judicieuses à toutes les étapes de la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale.