À Londres, en Angleterre, vers 1988, les pluies acides, et surtout leurs effets sur la qualité de l’eau, constituaient la plus grande préoccupation environnementale au monde. Howard Wheater faisait partie de l’équipe de recherche de la Royal Society of London, dont les travaux et leurs résultats ont convaincu la première ministre, Margaret Thatcher, de changer les lignes directrices du pays en matière d'émissions de dioxyde de soufre, mettant ainsi fin aux pluies acides.
« Nous étions confrontés à des enjeux fort complexes aux multiples dimensions, se rappelle M. Wheater. Nous devions comprendre la façon dont l’eau passait à travers les bassins des rivières ainsi que les principes chimiques et les changements aux politiques à adopter pour atténuer le problème. »
Récemment, le Forum économique mondial a classé les crises liées à l’eau comme la plus grande menace pour la planète. Une fois de plus, M. Wheater conjugue de nombreuses disciplines pour aider à régler ces enjeux environnementaux délicats. Cette fois-ci, il s’attaque au problème comme titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la sécurité de l’eau à l’ University of Saskatchewan.
« L’eau douce subit des pressions sans précédent dans le monde entier, dont une utilisation non durable des eaux de surface et des eaux souterraines, la pollution des rivières et des lacs et les dommages causés par les inondations et la sécheresse, a affirmé le chercheur. Les solutions sont de plus en plus complexes en raison du changement climatique et des pressions socio-économiques telles que l’augmentation de la population et la gouvernance fragmentée. »
En 2011, M. Wheater a créé le Global Institute for Water Security (l’institut) à l’University of Saskatchewan pour tenter de résoudre ces questions. L’institut profite du financement de la chaire d’excellence en recherche du Canada et fait appel à d’autres domaines de recherche qui dépassent la portée de la chaire, notamment les sciences sociales ainsi que l’eau et la santé.
M. Wheater prévient qu’à une époque marquée par des changements en partie dus à l’homme, la communauté des sciences de l’eau ne peut pas se limiter au « statu quo ni à la science incrémentielle ».
Il nous faut une nouvelle forme de science de l’eau plus globale, plus souple et plus stratégique, qui réponde aux besoins de la société concernant la sécurité de l’approvisionnement en eau.
Monsieur Wheater soutient que son institut a adopté ce type d’approche en transformant le bassin de la rivière Saskatchewan en un observatoire de grande envergure.
« Ce projet nous permet de modéliser les changements environnementaux à des échelles plus importantes, dans de nombreuses provinces et dans différents biomes », indique-t-il.
La superficie du bassin équivaut à la moitié de la France. Celui-ci s’étend des Rocheuses, en Alberta, jusqu’à la frontière entre la Saskatchewan et le Manitoba, traversant au passage la forêt boréale et les prairies. Cette région fournit 80 p. cent de la production agricole du Canada. On y compte également d’importantes zones de mise en valeur de ressources, notamment du pétrole, du gaz et de la potasse. Le fait que tous les permis d’utilisation d’eau ont été accordés dans le sud de l’Alberta ainsi que les inondations dévastatrices de 2011, de 2013 et de 2014 contribuent actuellement à créer d’importantes pressions sur les ressources aquatiques du bassin.
« La région regroupe plusieurs des pressions mondiales en matière de gestion d’eau » note M. Wheater.
Étalé sur 16 lieux d’étude chevauchant trois provinces, le programme de recherche de l’institut est fort varié. Malgré cela, les chercheurs affectés aux différents projets collaborent dans le but de mieux comprendre et de mieux diagnostiquer les changements environnementaux observés dans tout le bassin.